Une guerre statique ou globale

Sur le front occidental, Joffre savourait toujours la victoire alliée sur la Marne mais se désole que les Allemands occupent une grande partie du territoire français. A l'Est, Hindenburg et Ludendorff ont toutes les bonnes raisons d'être satisfaits de la grande victoire qu'ils ont remporté à Tannenberg. Échec! Echec! Echec!, crient Falkenhayn et Hindenburg devant leurs adversaires de l'Entente dans cette caricature d'un quotidien allemand (ci-contre)... Non seulement ils ont sécurisé la Prusse orientale et ragaillardi le pays, mais il peuvent bénéficier de renforts fraichement arrivés du front occidental. La tentation de mener une offensive à l'Est est très grande. Le nouveau patron de l'armée allemande, Von Falkenhayn, voulait initialement les utiliser pour achever le Corps expéditionnaire britannique – qui est le maillon le plus faible du dispositif franco-anglais – mais l'Allemagne se retrouvait avec une guerre sur deux fronts. Les Russes, bien qu'échaudés à Tannenberg, maintiennent la pression contre l'ennemi austro-hongrois qui se voit repoussé aux pieds des monts Carpates. Les plaines de Hongrie étaient menacées d'être envahies par les Russes sans que Vienne puisse faire grand chose pour se sortir du pétrin. A Berlin, Guillaume II vient au secours de François-Joseph en envoyant des renforts par rail pour fortifier le dispositif défensif de l'Autriche-Hongrie. Pour bousculer les Russes, Falkenhayn choisit de concentrer les forces allemandes aux lacs Masures ou l'armée de Rennenkampf essaie de passer l'hiver en se cantonnant dans les forêts de pins – d'autant plus qu'elle a été renforcée et réorganisée pour former la 10è Armée russe. L'envoi de renforts allemands a été facilité par le fait que les Russes, dans leur retraite vers l'Est, n'ont même pas pris l'initiative de saboter les voies ferrées allemandes. Ainsi, différentes divisions allemandes sont acheminées par rail et par moyens hippomobiles dans la neige et vont cantonner dans différents villages de Prusse orientale en attendant l'arrivée du printemps: deux armées allemandes établissent leurs positions défensives durant l'hiver 1914-15.

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Opérations fluides à l'Est

En ce début d'hiver 1915, Falkenhayn abandonne l'idée de frapper les Britanniques à l'Ouest et opte plutôt de frapper cette nouvelle armée russe qui cantonne aux lacs Masures. L'idée de donner une râclée hivernale aux Russes ne déplait pas à Hindenburg qui, rappelons-le, a été échaudé à Lodz en Novembre 1914. Le plan d'attaque allemand est de flanquer la 10ème Armée russe par le nord afin de l'embouteiller dans la forêt d'Augustow (clip ci-bas) et la détruire. Prisonniers russes frigorifiésLe 2 Février, un blizzard permet aux Allemands de s'approcher à bonne portée des cantonnements ennemis que ce soit à cheval ou en skis. Malgré le froid, Hindenburg lance l'attaque six jours plus tard. Les canons et mortiers allemands font un ravage sur les positions ennemies enneigées. Les officiers russes sont surpris et décontenancés par la vigueur des attaques et perdent leurs moyens – il devient impossible pour eux de faire face aux Allemands: plusieurs régiments sont décimés et des divisions entières doivent battre en retraite vers l'Est, souvent en abandonnant armes et bagages. Pour la Stavka, c'est une autre défaite démoralisante: 350,000 soldats se replient péniblement durant 11 jours pour échapper aux Allemands. Le 21 Février, les Allemands gagnent la bataille: 5 divisions ont été encerclées et anéanties l'une après l'autre – 90,000 tués et 110,000 prisonniers – ainsi qu'une décoration supplémentaire pour Hindenburg et Falkenhayn. Cependant, le spectacle offert par tous ces cadavres russes gelés et abandonnés a attristé Hindenburg: la nature des combats menés aux lacs Masures m'a glacé d'un vent mortel à la vue de ces nombreux charniers et de prisonniers à demi frigorifiés (ci-contre). Nos hommes vont sûrement se demander s'ils ont vraiment tué tous ces gens ou si tout cela n'est rien d'autre qu'une fable ou un fantasme lugubre. La forêt d'Augustow restera éternellement pour moi celle de la mort gelée. Fait à noter, durant la bataille de Waterloo en 1815, Wellington a eu un propos tout à fait analogue à celui de Hindenburg: La chose la plus triste après une victoire perdue demeure celle d'une victoire gagnée... Entretemps à St-Petersbourg, la population russe a été informée de ce grand désastre à Augustow mais ignore les raisons qui ont causé ce lamentable échec, à savoir que l'armée russe manquait de tout: peu de nourriture, peu d'armes et de munitions. Le ministre Soulkomlinov s'était pourtant presque insurgé contre cet état de fait dès Janvier: pourquoi nos soldats se battraient s'ils n'ont même pas de bottes convenables pour se chausser durant l'hiver? Notre artillerie tire très peu, nos hommes sont mal commandés sur le terrain quqnd ça va mal et ils se font tuer comme des perdrix. Le gouvernement tsariste constate que la production d'obus est insuffisante – soit 15,000 projectiles par mois alors que l'armée en avait besoin de 45,000. Les carences industrielles russes deviennent évidentes et illustrent que la Russie ne peut pas rivaliser avec la puissance industrielle de l'Allemagne, qui est la seule en Europe pouvant approvisionner régulièrement une grande force armée.

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La manoeuvre allemande contre la 10è Armée russe – Des prisonniers russes à Augustow

Malgré les pertes terribles en hommes et matériel, il est quand même remarquable que les forces russes opérant plus au sud progressent avec détermination pour réattaquer en direction de Lemberg et de menacer de nouveau la forteresse de Przemysl qu'ils avaient perdue en Octobre 1914. Pendant que les Allemands écrasaient les Russes aux lacs Masures, les Russes ont encerclé ces deux objectifs durant trois mois, si bien que la population civile affamée en était réduite à manger leurs chiens et chats. Le commandant de la forteresse ordonne une attaque pour briser son encerclement mais il échoue. Le 22 Mars, Przemysl se rend: 100,000 soldats austro-hongrois (parmi les meilleurs) et 17,000 soldats allemands sont faits prisonniers au grand plaisir de Nicolas II. Les Russes constatent alors le caractère multinational de l'armée austro-hongroise: on y retrouve des Croates, des Slovènes, des Tchèques, des Ruthènes, des Hongrois et, bien sûr, des germanophones – une vaste macédoine de soldats parfois volontaires mais la plupart conscrits – de l'Empereur François-Joseph. A Berlin, cette grande victoire russe hante Falkenhayn: il est clair que l'armée austro-hongroise va bientôt s'effriter, ce qui va menacer à terme la cohésion de l'Autriche-Hongrie. Les journaux allemands illustrent cette inquiétude dans leurs articles.

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Murets de Przemysl cassés par l'artillerie – Prisonniers austro-hongrois

Guillaume II se voit obligé de venir au secours de François-Joseph; la question est de savoir comment. Hindenburg et Ludendorff sont convaincus que la guerre peut être gagnée à l'Est à la seule condition que toutes les ressources disponibles soient acheminées sur ce front pour vaincre décisivement l'armée russe par le biais de grands mouvements tournants. Le Kaiser rejette cette stratégie pour privilégier le plan modeste de Falkenhayn: une progression à l'Est entre les villes de Tarnow et Gorlice pour détruire les forces russes déployées près de Lemberg. Une opération victorieuse menée à cet endroit ne gagnerait pas la guerre mais infligerait un coup terrible aux Russes déjà éprouvées depuis l'automne 1914 – la paralysie s'emparerait, selon lui, de l'armée russe. Les renforts déployés par Falkenhayn au pied des Carpates (180 wagons pour chaque corps d'armée) doivent attendre la fonte des neiges, si bien que les opérations militaires ne commenceront qu'en Avril. Le moral allemand est intact, car les soldats savent qu'ils ont le vent dans les voiles depuis le début de la guerre. Si Moltke n'avait pas échoué devant la Marne en Septembre 1914, les Allemands peuvent quand même se targuer de faire partie d'une organisation qui a toujours vaincu ses ennemis depuis Sedan en 1870 jusqu'à Waterloo en 1815. L'attaque menée contre les Russes serait dirigée par le général Von Mackensen. Sa directive principale était limpide: lorsque les positions ennemies auront été amollies et dispersée grâce à nos mortiers lourds, nos unités devront agir avec rapidité pour gober le maximum d'effectifs ennemis. Le 28 Avril, 170,000 soldats appuyés par environ 1000 canons de tout calibre passent à l'assaut sur un front de 18 milles de largeur; contrairement aux Russes, les Allemands ne manquent pas de munitions.

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Position russe balayée par l'artillerie – Le général Von Mackensen – Le général Broussilov

Les combats débutent le 2 Mai. Sous la couverture d'artillerie (ci-contre), des nuées de fantassins allemands se ruent en petits paquets dispersés sur les positions ennemies. Leurs progressions est dirigée par des observateurs postés dans des ballons. Les faibles réseaux de barbelés et de piquets ont été facilement franchies après seulement 30 minutes de pilonnage. Les Russes qui s'obstinent à garder leurs positions se font hacher par les tirs et achever par les fantassins allemands. Mackensen fait son rapport au Kaiser: j'ai le plaisir d'informer Votre Majesté que l'objectif de briser la mencace russe devant les Carpates a été mené avec succès. L'ennemi se replie rapidement sur toute la ligne de front que nous avons attaquée. Un officier russe en première ligne et qui écrit à son supérieur n'aura pas le même constat: nos troupes sont incapables de répliquer car elles n'ont que peu d'obus et plusieurs régiments sont à court de munitions. Les Allemands nous ont pilonné durant 11 jours en éliminant des pans entiers de notre ligne de défense. La seule chose que nous pouvons faire est de nous replier avant d'être encerclés. Le destinataire de ce message est le général Broussilov. Ce dernier sera le général russe le plus compétent et déterminé de tout le front de l'Est. Broussilov constate l'échec de ses soldats et télégraphie un message désespéré à St-Pétersbourg: nous n'avons plus de carabines pour armer nos unités. Nous avons désormais 150,000 soldats qui n'ont plus de carabines. Les grenades vont bientôt manquer et le pain aussi... Il faut que la Stavka nous envoie de la nourriture et du matériel le plus rapidement possible. Il prêche dans le désert... Sur le terrain, les soldats russes ne reçoivent plus d'ordres parce queurs officiers sont asbsents ou tués les privant ainsi de l'encadrement ponctuel nécessaire pour combattre – un grand nombre d'entre eux préfèrent se rendre. Le 30 Mai, les forces de Mackensen entre triomphalement dans la ville fortifiée de Przemysl où elles délogent les Russes qui occupaient la forteresse depuis plus de deux mois. Ainsi, les forces allemandes et austro-hongroises ont progressé de 110 milles et ont neutralisé toute menace russe à moyen terme dans cette région. La nouvelle de cette victoire ragaillardit autant Guillaume II et François-Joseph que la population allemande avide de lire de bonnes nouvelles dans les journaux.

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Les attaques de Von Mackensen ont été foudroyantes – Les Russes démoralisés battent en retraite

Rien ne semble arrêter la progression victorieuse de la Triplice. Pour preuve, les actualités cinématographiques allemandes montrent les visages de soldats marchant d'un bon pas et, surtout, ceux des Russes trop heureux de se nourrir à la gamelle de l'armée allemande dans les nombreux enclos pour prisonniers de guerre. Environ 100,000 Russes furent tués dans ce secteur en Mai 1915. En conséquence, l'Autriche-Hongrie aura plus d'un an de répit sur le front de l'Est et pourra se concentrer sur le front italien.

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Colonne allemande en marche et Austro-Hongrois au repos – Prisonniers russes heureux d'être en vie

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Opérations statiques à l'Ouest

Alors que les opérations à l'Est depuis Janvier ont été dynamiques, celles menées sur le front de l'Ouest deviennent plutôt statiques. La raison, telle qu'expliquée dans le segment introductif sur la situation militaire, est que Falkenhayn avait transféré la totalité de ses réserves sur le front de l'Est pour repousser les Russes qui menaçaient d'entrer en Autriche-Hongrie et de contre-attaquer vers la Prusse orientale. L'essentiel de l'effort militaire allemand de 1915 sera défensif à l'Ouest afin de permettre une fluidité offensive à l'Est. En France, les Allemands sont égrainés le long de l'Aisne et poursuivent la construction de tranchées. Ces ouvrages linéraires vont progressivement incorporer des remblais de terre battue et de rondins pour stopper les balles et les éclats d'obus, puis précédés de fils barbelés. Au fil des mois, les tranchées allemandes deviennent de véritables réseaux latéraux et en profondeur sur environ 400 milles, avec des niches pour abriter les soldats, des pillboxes en rondins garnis de mitrailleuses ou de petits canons Krupp de 77mm, et même parfois de véritables bunkers en ciment recouverts partiellement de terre battue. Un réseau de tranchée important peut parfois désorienter le soldat qui s'y trouve. Du côté allié, les Britanniques ont également construit quelques réseaux de tranchées obligatoirement drainées à cause de l'accumulation d'eau. L'activité militaire est minimale. Les Allemands guettent depuis leurs tranchée une éventuelle attaque française mais celle-ci n'est pas lancée. Parfois, une grenade saute et quelques coups de feu éclatent, sans plus. En face d'eux, les tranchées franco-anglaises situées entre 1/2 mille et 35 mètres de celles de l'ennemi attendent elles-aussi un assaut allemand sans que celui-ci soit lancé. Elles sont moins bien construites que celles des Allemands mais incorporent les mêmes éléments de construction. Aux yeux des soldats, la ligne d'arrêt temporaire suite à la bataille de la Marne prend soudain un caractère de plus en plus permanent. La seule contrainte des belligérants est la boue printanière qui inhibe tout effort d'attaquer ou de patrouiller. Cependant, les soldats savent très bien que "quelque chose" va sûrement arriver un jour.

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Vue en travelling d'un réseau de tranchée – Tranchée française en Argonne

La principale question que Lord Kitchener et les militaires de l'Entente se posaient en 1915 était de savoir s'ils pouvaient percer le réseau de tranchées allemand. Je constate à mon grand regret que l'armée française n'est pas disposée à attaquer les positions allemandes avant le début de l'été. Les Français croient que les tranchées ennemies sont devenues des forteresses inviolables, affirme Kitchener avec dépit. Mais la présence allemande en France ne laisse aucune alternative à Joffre: il doit attaquer l'ennemi qui est toujours à cinq jours de marche de Paris. Mais comment l'attaquer? Les reconnaissances aériennes françaises témoignent de l'épaisseur et de la profondeur du réseau de tranché allemand ou des obusiers de campagne sont déployés face aux lignes françaises. Pour Joffre, un seul moyen: l'artillerie lourde avec des obus explosifs. Lorsque les unités françaises seront suffisamment dotées de cette artillerie, elles pourront franchir les défenses allemandes et de vaincre l'envahisseur, affirme Joffre. Même constat pour le général Douglas Haig, commandant la 1ère Armée britannique: si nous avons en main suffisamment d'obus par batterie d'artillerie, nous pourrions écraser les Allemands. Quand nous en avions, il était facile d'attaquer leurs lignes. Le problème est que les Alliés n'ont pas suffisamment d'obus. Au début de la guerre, la France n'avait que 300 canons de gros calibre tractés contre 3500 canons légers et lourds allemands. Ces canons ont tous été fabriqués durant les années 1880 et ne possédaient aucun amortisseur de recul. En 1915, l'armée française reçoit 48 nouveaux canons lourds mais 18 d'entre eux ont vu leurs culasses exploser à la figure de leurs servants. Pour combler cette lacune, Joffre ordonne le démantèlement des mortiers lourds affûtés dans plusieurs forts comme ceux de Tulle et de Verdun. Sauf que ces engins sont trop massifs pour être déployés rapidement et tirent trop lentement en cas d'attaque. Le Corps expéditionnaire britannique (ou BEF) n'avait que 10 canons lourds par division au début de 1915 contre 30 pour chaque division allemande. Pour cinq ou six obus tirés par les Britanniques, les Allemands ripostent en moyenne avec une soixantaine de ces projectiles. Les soldats britanniques, qui n'avaient que leurs mitrailleuses Vickers affûtés aux parapets et meurtrières de leurs tranchées, étaient frustrés de ne pas bénéficier d'un appui d'artillerie adéquat alors que les obus ennemis pleuvaient sur leurs positions. Le terrain dit "no-man's land" devant la ville de Ypres était si troué par les obus explosifs allemands qu'il ressemblait à un gruyère interdisant le passage à de grandes unités d'infanterie - et souvent même aux petites. En Février, le commandant de la BEF, le général John French (ci-contre), interdit à chaque canon lourd de tirer plus que huit obus par jour et les canons de campagne plus que dix projectiles. Un artilleur britannique écrit au premier ministre britannique: nous ne savons pas qui est responsable de cette négligence logistique. La seule tragédie que nous vivons est que nous ne pouvons pas attaquer à cause du manque d'obus. Notre infanterie se fait massacrer sur place...

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Ce mortier lourd Filloux français est peu maniable – La grenade dite "hair-brush"

Les Britanniques manquaient également de mortiers et de grenades et ont improvisé des armes artisanales pour les utiliser contre les tranchées allemandes – comme de gros lance-pierres pour envoyer des grenades; une bombe improvisée appelée "hair-brush grenade" sera utilisée durant toute l'année 1915; des boîtes de conserves garnies de fulmicoton, de chlorate de potassium, de clous et d'éclats de verre (voir dossier La campagne des Flandres); quelques unités vont jusqu'à improviser des mortiers de tranchée sans savoir si le projectile lancé tombera sur eux ou sur les Allemands... Du côté britannique, les obus reçus devaient être comptés chaque jour et entreposés comme s'il s'agissait de lingots d'or et distribués seulement à la douzaine pour chaque canon. On assiste également à ce même phénomène d'esprit de garde-magasin dans l'armée française.

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Un tunnel de sape – Français épiant une tranchée ennemie

Dans les deux camps, une véritable bataille de "taupes" va se dérouler sous les lignes pour creuser des tunnels de sape afin de placer des explosifs, ce qui aura pour effet de pulvériser un réseau de tranché ennemi ou un bunker jugé trop dangereux. Le temps de creusage dépend de la nature du terrain et de la dangerosité générale de la zone de combat ou il faut miner. Il arrivera parfois que des tunnels se croisent latéralement de part et d'autre de la ligne de front en direction d'une position ennemie à faire sauter. On s'écoute et s'épie. Lorsque les charges sont placées sous une position ennemie, on attend l'imminence d'une explosion...

 

Echec des attaques alliées

Au printemps 1915, les Alliés lancent quelques petites attaques qui vont échouer faute d'une préparation d'artillerie suffisante pour percer les tranchées allemandes. Chaque progression d'infanterie était acceuillie par un tir nourri d'obusiers allemands. L'offensive française du printemps lui coûte 240,000 soldats (dont 90,000 tués). Le 10 Mars, les Britanniques lancent une attaque à Neuve-Chapelle (voir onglet Flandres). La préparation d'artillerie était suffisante pour briser le premier réseau défensif allemand mais il n'y avait pas assez d'obus en stock pour détruire le second réseau: l'attaque a été bloquée. Le 6 Avril, les Français attaquent les hauteurs devant St-Mihiel pour enfermer les Allemands dans un saillant: ils échouent également dans un environnement ou les corps-à-corps seront nombreux – même de nuit (clip ci-bas). Ces assauts, bien que coûteux, n'étaient que des préliminaires. La véritable tentative organisée pour briser le front allemand est lancée en Mai, sauf que les Allemands vont devancer les Alliés en les attaquant le 22 Avril à Ypres (voir onglet Campagne des Flandres) avec des gaz de combat. Là-aussi, le manque d'obus pour répliquer aux attaques des fantassins allemands va autant irriter le président Poincaré que fragiliser le gouvernement britannique parce qu'elle illustre qu'une guerre ne se gagne pas seulement sur les champs de bataille mais aussi dans l'industrie qui se doit de donner son plein rendement pour produire les armes et le matériel nécessaire à la conduite des opérations.

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Corps-à-corps devant St-Mihiel – Kitchener est pointé du doigt dans le scandale des obus

En ce printemps 1915, le fait demeure que l'industrie allemande et austro-hongroise produit plus d'armements et d'équipements que les pays de l'Entente. La Triplice applique une politique de production de guerre qui n'existe pas en France, en Angleterre et en Russie: L'Allemagne est tout simplement la meilleure entité productive du monde et la plus efficace à augmenter sa production, écrit le libéral David Lloyd-George. En Angleterre, l'armement et l'équipement militaire était produit par des petites et moyennes entreprises (PME) habituées à des contrats très limités. Le principal noyau productif était l'arsenal de Woowich – sauf qu'un arsenal n'est pas une véritable usine proprement dite comme Krupp qui est étendue et outillée pour la production en série. En Mars 1915, le War Office a contracté des demandes de munitions dans 2500 PME mais le grand délai entre la commande passée et la livraison du produit a conduit à des délais déraisonnables: seulement le quart de ce qui a été commandé aura été produit et livré – souvent en mauvais état – ce qui va conduire le nouveau gouvernement de David Lloyd-George à signer des contrats avec des usines américaines. Fait à noter, aucun effort n'a été fait au niveau gouvernemental pour mobiliser l'ensemble de l'industrie britannique pour la mettre sur un pied de guerre. Le nouveau premier ministre affiche sa frustration dans un article publié par le London Times: nos soldats meurent en France et notre industrie est aussi embourbée dans des méandres aussi gluants que la boue des Flandres. Les industriels laissent tomber nos soldats... Le 22 Février, Lloyd-George affirme aux Communes que nous devons sincèrement doubler notre effort productif et organiser nos maudites usines et tous les ateliers de ce pays pour produire des armes et munitions. Notre population doit maintenant se préparer à subir des privations et même de graves épreuves sur le plan de l'économie domestique. Le 9 Mai, les Français et les Britanniques lancent une nouvelle attaque sur une partie du front avec assez d'obus pour 40 minutes de tir de barrage. Le problème était que huit obus tirés sur dix sont des projectiles fusants et non pas explosifs: ils ont été conçus pour exploser en l'air et envoyer les éclats en éventail vers le sol. Ils sont efficaces contre l'infanterie, les chevaux et les tentes mais ne peuvent pas venir à bout des remblais et butons fortifiés des tranchées ennemies. Une fois de plus, les soldats alliés sont contraints une d'exposer leurs poitrines aux balles allemandes dans des efforts inutiles pour briser le front ennemi. Les journaux britanniques démentent les propos mensongers de French et de Kitchener en publiant des articles sur la réalité de ce qui se passe en France et en particulier dans les Flandres. La population britannique est dégoutée mais le gouvernement d'union nationale tient bon.

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Un conflit global

En ce printemps 1915, pendant que l'on galope allègrement sur le front de l'Est et que l'on s'enlise sur le front de l'Ouest, les deux alliances réfléchissent sur la conduite générale d'une guerre qui semble les mener vers une impasse. Les populations civiles sont bien tenues en main par la censure journalistique mais le prix du sang commence dangereusement à augmenter. Pour les pays de l'Entente, l'effort de guerre principal doit être mené en Europe car elle est le lieu où sont livrés les principaux affrontements et ou seront signés les éventuels traités de paix. Pour la Triplice – en particulier l'Allemagne – les théâtres d'opérations internationaux seraient un bon moyen de disperser l'effort de guerre ennemi dans le but de lui donner une grande victoire décisive sur le continent européen. Guillaume II et François-Joseph font allusion aux zones maritimes sensibles, au Moyen-Orient, en Asie et, surtout, aux possessions coloniales françaises et anglaises en Afrique. Le pari des décideurs de la Triplice était que la France et l'Angleterre feraient tout ce qu'il faut pour sauver leurs acquis coloniaux. Fait à noter, l'Allemagne n'avait pas l'intention de profiter de la guerre pour acquérir des colonies mais plutôt pour réduire la pression militaire de l'Entente sur ses deux fronts. L'Angleterre non plus, car son seul soucil était essentiellement de conserver son empire plutôt que de l'agrandir. A Londres, le secrétaire d'État aux Colonies n'a pas l'intention de jouer le jeu de la Triplice: Nous savons que nos colonies sont notre talon d'Achille dans cette guerre et que les Allemands veulent nous distraire de notre effort de guerre en Europe. Aucune unité majeure ne doit être envoyée dans les colonies car l'effort de guerre européen et la maîtrise de nos routes maritimes constituent l'essentiel de notre politique de guerre.

Quinze ans avant la guerre, l'Allemagne avait fait main basse sur plusieurs comptoirs africains transformés en colonies et développé une marine de guerre dans le but d'affirmer une politique mondiale (Weltpolitik) telle que définie par le chancelier de l'époque, Von Bulow. Nous avons également le droit à notre place au soleil, dit-il en 1897. L'Allemagne (tout comme l'Italie) est arrivée tardivement sur la scène coloniale. En 1900, elle s'installe au Togo, au Cameroun, au Sud-Ouest africain et en Afrique orientale (Tanzanie). L'Allemagne possède également de nombreuses possessions dans le Pacifique: l'archipel Bismarck, la Nouvelle-Guinée, les Samoa, les Carolines et la Micronésie. Chacune de ces colonies allemandes possédait des stations de relais télégraphiques les liants les unes aux autres, de même qu'à Berlin. Cependant, son acquis le plus important se trouve en Chine: la ville portuaire de Tsingtao. Le patron de la Flotte allemande, l'amiral Tirpitz, aime beaucoup le concept d'une politique mondiale allemande chapeautée par sa marine. Il écrit dans son journal personnel que nous ne sommes qu'au tout début d'un nouveau partage du globe où l'Allemagne pourra influer sur la suite des choses. Guillaume II et Von Bulow voyaient grands – peut-être trop grands pour les ressources économiques et industrielles du IIè Reich. Ils convoitaient de conquérir Porto-Rico et de faire main basse sur le canal de Panama au moment où il sera terminé. Le dépouillement récent des archives diplomatiques allemandes nous révèle que le schéma impérial le plus grandiose du Kaiser était le Plan Opérationnel #3 conçu en 1903 et dirigé contre les États-Unis. Un officier d'état-major de la Marine allemande, Eberhard Von Mantey, consigne quelques impressions dans son journal personnel: New-York va paniquer devant le possibilité d'un pilonnage naval si nous n'arrivons pas à négocier avec ces "traders".

Ce plan prévoyait l'envoi de 60 navires, dont plusieurs transports de troupes portant un effectif de 100,000 soldats, pour occuper Boston et pilonner Manhattan. La motivation derrière ce Plan Opérationnel #3 était le ressentiment bien senti de Guillaume II envers le capitalisme américain qu'il jugeait, à terme, menaçant pour les intérêts allemands sur la scène internationale. L'affirmation des États-Unis comme Etat émergeant constituait un danger pour son Etat militariste. Le Kaiser croit qu'en s'attaquant aux États-Unis, il pourrait perturber le commerce mondiale et imposer une sorte d'arrangement géopolitique avev les Américains. En Allemagne, la connaissance de ce plan secret est rejeté par le petit aéropage de décideurs qui en connaît l'existence. Les banquiers et les industriels allemands ne voulaient pas s'aliéner les États-Unis car ils sont leurs principaux fournisseurs étrangers de devises et de moyens industriels. La révolution industrielle allemande d'avant-guerre n'a été possible que par l'infusion de capitaux et de transferts technologiques américains. En conséquence, le Plan Opérationnel #3 a été mis au rebut – mais pas l'hostilité de Guillaume II envers le capitalisme américain. La Marine allemande n'était tout simplement pas assez puissante et autonome pour affronter l'US Navy. Qui plus est, l'Angleterre n'aurait jamais acceptée une telle posture navale de la part de l'Allemagne.

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La ville portuaire de Tsingtao – L'amiral Tirpitz

Entre 1905 et 1912, la Weltpolitik du Kaiser est troquée au profit d'une politique étrangère plus réaliste et centrée sur des objectifs continentaux. L'Allemagne se prépare à mener, si nécessaire, une guerre européenne dont l'esquisse laisse deviner une convoitise pour les bonnes terres noires d'Ukraine et de Pologne – ce sera la Ostpolitk – qui se traduira dans les faits par le Plan Schlieffen. Au moment de l'entrée en guerre, la grande majorité de la flotte allemande est basée dans ses ports de la mer Baltique et à Wilhemshaven afin de s'opposer à la Royal Navy en mer du Nord. Tout ce que l'Allemagne disposait pour projeter sa puissance sur les mers était une petite flottille de 17 croiseurs dispersés aux quatre coins du globe. Ces navires étaient en contact radio avec Berlin via les relais télégraphiques de ses colonies. Le croiseur Koeningsberg naviguait le long de l'Afrique orientale, tout comme le Goben et le Breslau en Méditérannée; il en est de même pour le Karlsruhe et le Dresden dans les Caraibes; le croiseur Liepzig navigue le long de la côte est des États-Unis. Cependant, l'élément naval allemand le plus important d'outre-mer était basé à Tsingtau, sous le commandement de l'amiral Von Spee. La base de Tsingtao permet à l'Allemagne de faire pression sur le Japon qui louche vers l'Entente et de lui disputer le contrôle des routes maritimes en mer de Chine. Ni Londres ni Tokyo ne pouvaient accepter une pareille menace. L'Angleterre n'at pas les ressources nécessaires pour chasser les Allemands de Tsingtao et elle demande au Japon de faire le gros du travail – ce qui donnera aux Japonais à la fois une opportunité d'établir un partenariat avec l'Entente et d'acquérir un nouveau pied à terre en Chine. La main tendue par l'Angleterre servira parfaitement les intérêts de la marine japonaise mais le Kaiser n'est pas disposé à céder cette ville portuaire: Il ne me vient même pas à l'idée de laisser Tsingtao aux Japonais que de céder Berlin aux Russes, dit-il.

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Obusier japonais devant Tsingtao – Des Britanniques débarquent à Tsingtao sous le regard des Japonais

Le 2 Septembre 1914, les Japonais débarquent 60,000 soldats près de Tsingtao pour assiéger la garnison de 4000 Allemands; ils sont rejoints par 2000 Britanniques. Depuis leurs positions défensives, les Allemands ne peuvent que contempler l'étendue du dispositif déployé contre eux: que pouvons-nous faire pour contrer l'arrivée massive de ces singes jaunes qui se rapprochent de nous de jour en jour. Les tirs des canons qui nous assiègent sont puissants. Si nous sortons de là avec tous nos morceaux, nous seront vraiment chanceux. Il nous est impossible d'obtenir des renforts et l'on sent déjà le noeud qui nous serre le cou, affirme le soldat Botjers dans son carnet. Néanmoins, les attaques japonaises ont été repoussées à quatre reprises (ci-contre). Le 17 Novembre, les Japonais prennent Tsingtao. Plusieurs prisonniers allemands lèvent le nez sur le petit nombre de Britanniques qui ont aidé les Japonais. Ces "braves" Britanniques... Ils n'ont presque pas participés aux combats et ont le culot de se placer au-devant de la parade des vainqueurs, écrit un soldat allemand. Lorsque le défilé passe devant les prisonniers, ces derniers leur tournent le dos en montrant leurs fesses. Le commandant britannique se plaint de cet outrage au général japonais qui, amusé, lui répondit: euh, nous ne pouvons quand même pas refaire le défilé à cause de ça... Ainsi, la prise de Tsingtao donne aux Japonais un tremplin pour étendre leur empreinte maritime dans le Pacifique. En quelques semaines, ils exigent des droits commerciaux en Chine et mettent la main sur toutes les possessions allemandes au nord de l'équateur. En réaction, l'Australie et la Nouvelle-Zélande font de même pour les autres aquis allemands au sud de l'équateur. Ce partage informel des atolls du Pacifique s'est fait sous le regard dépité et inquiet des États-Unis qui reprochent vivement à l'Angleterre d'avoir permis au Japon de s'imposer comme un acteur international dont l'appétit sera difficile à modérer.

Un va-tout naval

Alors que le siège de Tsingtao est en cours, l'amiral Von Spee redoute de faire cadenasser ses navires dans le port. Avec la permission de Berlin, sa flottille quitte Tsingtao afin afin de perturber les navires alliés dans le Pacifique et l'Océan indien. Le Kaiser lui donne l'autorité pour agir à sa guise et avec le maximum de flexibilité opérationnelle (clip ci-bas). Spee a cependant mal évalué ses options stratégiques. En effet, le plus grand potentiel de nuisance de sa flottille était dans l'Océan indien où les Britanniques obtenaient des renforts militaires depuis l'Inde. Le traffic commercial y était également plus élevé et il lui serait plus facile de rejoindre l'Atlantique. Cependant, Spee divise sa flottille en deux segments: le croiseur Emden commandé par le capitaine Von Muller sera le seul navire à se diriger vers le Golfe du Bengale alors que les autres navires sous le commandement de Spee traverseront le Pacifique pour rejoindre le Chili avant de passer vers l'Atlantique – un périple risqué et plutôt inutile car il n'y avait que très peu d'objectifs navals ennemis à neutraliser. Qui plus est, Spee doit traverser un immense océan au moment où il apprend qu'une escadre japonaise est à ses trousses.

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Spee aura la liberté d'action qu'il désire – Le port de Papeete pilonné

L'Amirauté britannique se demandait quelle serait la direction privilégiée de Spee dans le Pacifique. Cet océan est si vaste et trufflé d'atolls. Qui sait par où il passera et cela représente quand même un certain danger, écrit Churchill. La route que doit suivre Spee est prévisible car ses navires ont besoin de charbon ou de bois à tous les dix jours. Ainsi, la flottille va s'arrêter dans des îles où il aura beaucoup de bois, tout en arraisonnant des navires pour leur voler leur charbon. Le gouvernement chilien accepte de ravitailler et abriter les navires de Spee. Dès que les agents de l'Intelligence Service britannique au Chili ont reçu cette information, l'Amirauté britannique envoie des navires dans le Pacifique via le canal de Panama pour l'intercepter. Entretemps, Spee pilonne le port de Papeete à Tahiti et en profite pour faire le plein de charbon. le 1er Novembre 1914, Spee est informé que des croiseurs britanniques vont l'intercepter près des îles Coronels. Ceux-ci sont commandés par le vice-amiral Cradock, mais ils ne sont pas assez modernes pour affronter les croiseurs allemands Scharnhorst et Gneisenau – mieux armés et plus rapides. Le seul croiseur britannique moderne doit être réparé en Jamaique pour des avaries de moteur, ce qui signifie que Cradock sera désavantagé dans le combat à venir. Spee repère les croiseurs de Cradock et les tenaillent. Les canons allemands trouèrent le navire de Cradock, le Good Hope, qui explosa. Une heure plus tard, le Monmouth subit le même sort. L'Otranto et le Glasgow, tous deux endommagés, réussirent à s'esquiver sous écrans de fumée. Les navires de Spee sont peu endommagés, et une vingtaine de marins sont tués. En revanche, les Britanniques avaient 1600 tués. L'amiral Spee commit une faute stratégique à la suite de sa victoire. Ravitaillé, il aurait du passer le Cap Horn dans les meilleurs délais pour choisir une route le menant soit à l'Océan Indien soit le long des côtes africaines. Il choisit de lécher ses plaies mineures en retournant mouiller à Mar as Fuega. Les quelques jours de repos des Allemands vont permettre aux Britanniques de se ressaisir et de confronter l'escadre de Spee ultérieurement avec de meilleurs moyens. La bataille de Coronel a été la première défaite de la Royal Navy depuis 250 ans. Cette nouvelle fut très mal reçue par l'opinion publique britannique. L'Amirauté reconnaît à la fois les compétences navales et l'adresse des marins allemands. De ce fait, elle constate que le leadership allemand a été supérieur à celui des officiers de Sa Majesté. Londres envoie une escadre dans l'Atlantique Sud pour intercepter les navires de Spee. Suite à cette victoire, la guerre dite "globale" se déroule selon le souhait des Allemands.

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Les batailles de Coronel et des Falklands

L'amiral Von Spee, dont les navires ont été ravitaillés à Valparaiso, passent le Horn. Berlin lui apprend que des navires britanniques sont en route pour l'intercepter. Spee s'approche des îles Falklands et opte de faire un raid sur Port Stanley, détruire la station d'écoute britannique, et emporter un peu de charbon. Cependant, il est surpris de voir que les croiseurs britanniques du vice-amiral Sturdee sont déjà ancrés et s'apprêtent à appareiller comme en témoigne leurs cheminées (clip ci-haut à droite). La Royal Navy a pris le risque d'envoyer deux de ses plus récents croiseurs de classe Dreadnaught aux Faulkands. Spee constate que les navires britanniques sont à la fois plus rapide et mieux armés que les siens et choisit de fuir rapidement en haute mer. La flottille de Spee est rapidement encadrée par les poursuivants britanniques qui ouvrent le feu à un mille de leurs cibles. Le 8 Décembre 1914, un des capitaines de Spee écrit: nous savons maintenant qu'il ne nous reste rien d'autre à faire que de nous battre et de mourir honorablement. Spee ralentit et accepte le combat. Des tirs sont échangés mais les Britanniques restent hors de portée de ses canons. A 16H15, le croiseur Scharnhorst est troué par plusieurs dizaines de coups au but et coule corps et bien – y compris l'amiral Von Spee. A 18H00, c'est au tour du Gneisenau qui chavire en emportant la plupart de ses marins, dont le fils de Spee. Une demi-heure plus tard, le croiseur Nuremberg reçoit des bordées de deux côtés et chavire lentement sous les regards tristes des marins britanniques qui constatent que les survivants s'accrochent à la coque en brandissant le drapeau impérial. Durant les combats, trois croiseurs légers allemands parviennent à fuir vers la côte de l'Afrique occidentale. Ainsi, la bataille navale des Falklands met un terme à la menace globale allemande sur les mers, mais pas dans l'Océan indien.

Auparavant, dans le Golfe du Bengale, la menace navale allemande était la présence du croiseur Emden commandé par le très compétent capitaine Von Muller. Charismatique et très aimé de ses hommes, il aura la tâche ingrate de perturber tout seul le traffic maritime britannique entre l'Inde et la Mer rouge – ce qui est dans les fait très au-delà de ses moyens. Muller se met à la tâche car il sait que l'Inde est le joyau de l'Empire britannique qui fournit les renforts humains et matériels en direction de l'Égypte. Pour réaliser les interceptions de navires marchands ennemis, le Emden se coiffe d'une fausse cheminée pour ressembler à un croiseur britannique muni du pavillon britannique. Au moment du combat, le pavillon est retiré et est remplacé par le drapeau impérial – à la stupéfaction des équipages ennemis. Après un coup de semonce, le navire attaqué reçoit l'ordre d'évacuer ses passagers sans se servir de sa radio; des équipes d'abordage se saisissent du fret, du charbon et du whisky ennemi avant de le saborder. Muller se fait un point d'honneur de récupérer tous les équipages et passagers britanniques et indiens sur l'Emden sans les maltraiter avant de les débarquer dans un port côtier indien. Quatorze navires marchands furent coulés en 20 jours d'opérations dans le Golfe du Bengale. L'Amirauté s'inquiète de la menace posée par l'Emden et va traquer les mouvements du croiseur allemand. Le 22 Septembre 1914, Muller profite du couvert de la nuit pour s'approcher du port de Madras et le pilonne; détruisant plusieurs entrepôts et citernes. Les mortiers lourds côtiers n'avaient pas une portée suffisante pour toucher le croiseur. A Londres, les compagnies d'assurances inquiétées par ces pertes augmentent leurs tarifs pour couvrir les frais des navires de transport en partance pour l'Inde. La marine marchande britannique va se cloîtrer dans les ports indiens. Churchill écrit que: trois transporteurs de troupe ne peuvent appareiller de Calcutta par crainte de l'Emden. Cela signifie que nos renforts en hommes, en artillerie, et en cavalerie sont retardés. Efforçons-nous d'éradiquer cette peste navale aussi rapidement que possible.

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Le capitaine Von Muller et son croiseur – L'Emden endommagé s'est échoué sur l'Île de Keeling

Pendant que l'Inde s'inquiète de l'action de l'Emden, 25 croiseurs légers britanniques poursuivent le croiseur Koeningsberg opérant sur la côte de l'Afrique orientale. Ce croiseur allemand avait déjà attaqué l'île de Zanzibar et réussit à esquiver les navires ennemis. Les Britanniques sont si frustrés qu'ils bloquent tous les ports africains dans l'espoir de le capturer. Dans la nuit du 2 Décembre 1914, le Koeningsberg arrive au port colonial allemand de Tanga, en Afrique orientale allemande. Deux croiseurs britanniques et un transporteur de troupes indiennes mouillent sans discrétion (tous feux allumés) à proximité avec pour objectif de prendre le port. Les auxiliaires africains allemands (ou Askaris) prennent position et postent leurs mitrailleuses un peu en retrait des plages pour ne pas s'exposer aux tirs des croiseurs. Ils cherchent à attirer les soldats indiens dans un périmètre où il sera impossible pour les croiseurs de les appuyer de leurs canons. Les tirs allemands sont précis et de nombreux Indiens sont tués avant même de combattre. D'autres seront tués presque à bout portant (ci-bas). Malgré leur supériorité numérique, les Britanniques n'arrivent déloger les 2400 Allemands et Africains de Tanga. Les pertes se chiffrent à 360 tués et 487 blessés pour les Brits. Les Allemands ont perdu 16 soldats réguliers et 55 auxiliaires askaris et les combats permettent au Kenigsberg de s'échapper.

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La bataille de Tanga – Soldats indiens tués

Les Britanniques croyaient que la prise de Tanga serait facile et permettrait de couper le ravitaillement au croiseur Koeningsberg, mais ils ont été défaits par un officier allemand de première valeur, le général Paul Von Lettow-Vorbeck. Cet officier de carrière prussien est à la fois charismatique et déterminé à conserver cette ville coloniale que le gouverneur Schee voulait laisser aux Britanniques. Son ascendant sur ses auxiliaires africains lui permet d'empêcher une nouvelle attaque des soldats indiens: trois compagnies de soldats réguliers allemands vont l'épauler à venir à bour des Indiens qui sont peu entraînés. Il gagne sa bataille et Guillaume II est ravi: nous avons affaire à un bon bougre qui se bat avec compétence contre le Goliath britannique. Si nous ne pouvons pas l'aider directement par l'envoi de renforts, il nous faudra tout de même l'épauler avec des ressources matérielles, dit-il à son chancelier. L'ennui c'est que le blocus naval britannique contre l'Allemagne interdit l'envoi de toute aide matérielle à Lettow-Volbeck. Au même moment dans l'Océan Indien, le croiseur Emden a coulé deux croiseurs légers britanniques et sabordé 23 navires marchands. Le 9 Novembre 1914, l'Emden s'ancre devant l'île Keeling pour détruire la station de transmission britannique et gober un peu de charbon. Avant d'être arrêté, l'opérateur-radio identifia formellement l'Emden et relaya sa position dans un message de détresse. Le croiseur australien Sydney reçoit le message et met fin rapidement à la carrière du célèbre croiseur allemand. L'Emden est troué de toutes parts et son équipage l'évacue en catastrophe; le navire s'échoue sur une berge rocailleuse.

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Le général Von Lettow-Vorbeck – Auxiliaires Askaris allemands

Suez et l'Afrique

Pour affaiblir l'Empire britannique, l'Allemagne de Guillaume II mise sur son nouvel allié ottoman depuis Novembre 1914 (voir dossier Un Djihad?) pour qu'il s'empare du canal de Suez – artère vitale liant l'Angleterre à l'Inde – très vulnérable à une attaque terrestre. L'ennui, est que l'Allemagne n'a pas de renforts militaires pour épauler la Turquie, à l'exception d'une poignée de conseillers militaires. En 1915, la 4è Armée turque est basée en Palestine et ses unités sont dispersées afin de bien tenir en main cette région. Certaines d'entre elles étaient à moins de 100 milles du canal de Suez. Les Turcs ottomans acceptent de prendre le canal mais ne consacrent qu'une seule division (19,000 soldats) pour faire le travail, ce qui fait foncer beaucoup de sourcils à Berlin. À Constantinople, l'élite ottomane se voit déjà reconquérir à rabais l'Égypte et la Libye. Elle va rapidement déchanter. Les Turcs progressent de nuit dans le Sinai désertique en chameau, à pied et munis d'éléments de pontons et d'esquifs pour traverser d'une berge à l'autre. Le 3 Février 1915, la division turque se déploie sur les berges occidentales du canal et attaquent sur un front de 32 milles de largeur avec pour objectif la ville de Serapeum. Les esquifs sont rapidements mis à l'eau mais le colonel allemand qui avait planifié l'opération constate qu'elle tourne rapidement au désastre. Les Turcs sont confrontés à une plus grande résistance que prévue de la part de 30,000 soldats indiens encadrés par des réguliers britanniques et 9 navires de guerre; ils perdent rapidement toute cohésion dans leur tentative de traversée. Durant cette journée, 1200 Turcs sont tués et les survivants se replient en désorde dans le Sinai. Il ne sera plus question pour la Turquie de tenter une nouvelle attaque: l'Égypte sera ainsi épargnée d'une menace d'invasion et deviendra la cour arrière des renforts indiens et africains vers l'Europe.

L'échec ottoman contre le canal de Suez

En Afrique, la partie n'est pas encore jouée car l'Allemagne dispose de trois colonies lui servant de bases pour affronter les Franco-Anglais. L'ennui majeur est que ces colonies sont trop éloignées l'un de l'autre pour s'épauler sur le continent africain. Encore une fois, faute de renforts venus d'Europe, les administrateurs coloniaux allemands seront obligés de faire une petite guerre avec de petits moyens. Outre l'Égypte et son canal, l'acquis colonial africain le plus important pour l'Angleterre était l'Union sud-africaine mais celle-ci n'était pas encore entièrement loyale et acquise à l'Entente. La population sud-africaine était un curieux mélange de Noirs africains, de Boers, d'Anglais et même d'Indiens qui s'étaient déchirés 15 ans plus tôt dans une guerre avec l'Angleterre. Beaucoup de gens n'estiment pas beaucoup les Britanniques. Pour preuve, un officier supérieur sud-africain avait demandé au président Louis Botha: Mes hommes sont prêts. Si la guerre est déclarée en Europe, contre qui nous batterons-nous? Les Anglais ou les Allemands?, lui dit-il. Sauf que l'Afrique du Sud est parfaitement située pour lancer une attaque contre la colonie allemande du Sud-Ouest africain. Le Secrétaire d'État aux Colonies, Louis Arbour, relève le défi, tout comme le gouvernement sud-africain parce que ce dernier y voit une opportunité pour ses propres intérêts: s'emparer et annexer cette colonie. Le 14 Septembre 1914, l'armée sud-africaine traverse la rivière Orange et entre au Sud-Ouest africain. Les Allemands ont vu venir le coup et embusquent une unité africaine au puits de Seinfontein. Des feux croisés de mitrailleuses fauchent les Sud-Africains progressant en plaine et sont défaits. En apprenant la nouvelle, quelques comtés sud-africains se révoltent contre le gouvernement Botha. Au Cap (ou Capetown), une petite garnison sud-africains commandée par Marnie Maritz se rallie immédiatement à l'Allemagne et propose un deal au gouverneur du Sud-Ouest africain, Ernst Goering (le papa de Hermann): soit de transférer son unité dans la colonie allemande pour combattre les Britanniques et leurs loyalistes. Le 9 Octobre, Goering accepte et Maritz – qui avait autrefois mené une guérilla efficace durant la guerre des Boers – amène son unité dans au Sud-Ouest africain dans le village de Schuit Drift et se lance dans une campagne de recrutement auprès des Boers et des Noirs pour lutter contre Botha et les Britanniques. Maritz et ses partisans iront jusqu'à proclamer une république sud-africaine indépendante de l'Empire britannique.

Marnie Maritz et ses lieutenants s'allient aux Allemands

A Londres, Arbour craint l'effritement de l'Union sud-africaine et ordonne discrètement l'envoi de 30,000 soldats australiens en Afrique du Sud. Son inquiétude est réelle: Le maintien de l'Union sud-africaine est une priorité stratégique de la plus haute importance pour l'Angleterre. L'éventuel contrôle du Sud-Ouest africain par nos troupes restera très secondaire, affirme-t-il aux Communes. L'aide australienne ne sera pas nécessaire car le gouvernement Botha vient à bout des rebelles boers: plusieurs dizainnes ont été tués et une cinquantaine ont été arrêtés et jugés à Capetown. Maritz s'enfuit en Suisse et ne reviendra en Afrique du Sud qu'en 1924. En Avril 1915, les Britanniques et le gouvernement sud-africain déploient leurs ressources pour venir à bout du Sud-Ouest africain. Ils y parviennent sans peine dans de brefs combats et imposent leur tutelle victorieuse au gouverneur Goering. Par la suite, les Britanniques organisent une expédition de grande envergure pour conquérir la colonie allemande de l'Est africain et vaincre le général Von Lettow-Vorbeck. Mais comme toujours, les Britanniques n'ont pas de troupe sur place pour faire le gros du travail et Londres demande l'aide du ministre sud-africain de la Défense, le général Smuts, de fournir l'essentiel du corps expéditionnaire. Ce dernier avait auparavant combattu dans le camp boer mais il est devenu ultérieurement pro-britannique. Smuts organise l'expédition militaire mais va la diriger très partiellement sans grand talent militaire. Ses officiers de renseignement constatent que Smuts veut éviter à tout prix une bataille conventionnelle à l'européenne et passer pour un "boucher" aux yeux de l'opinion publique. Une campagne à moindre échelle pose également des problèmes: Si Lettow-Vorberck joue à cache-cache avec nos troupes, Smuts sera en grande difficulté, disent-ils.

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Soldats sud-africains vers Windoek – Types de soldats sud-africains

Lettow-Vorbeck sera rusé pour faire face à la menace sud-africaine car il connaît à la fois la réalité politique et topographique de l'Afrique méridionale mieux que les Sud-Africains. Son idée était d'enrayer toute possibilité d'envoyer des renforts coloniaux en Europe en créeant un front en Afrique. Gêner la position militaire et politique de l'Entente auprès des peuples africains lui apparaît capital. La question était de savoir si Lettow-Vorbeck pouvait appliquer cette stratégie malgré la faiblesse de ses effectifs. En Août 1915, il organise des unités de 10,000 Askaris (ci-contre)pour mener une guerre de guérilla contre la supériorité numérique de ses adversaires. Lettow-Vorbeck sait que les Sud-Africains ont de la difficulté à progresser vers le nord-est avec leurs unités toutes pesantes de matériel, de chevaux et de mules et il ne se trompait pas. Smuts mettra plus d'un an avant d'arriver aux portes de la colonie allemande orientale, non sans avoir subi des pertes humaines importantes – surtout par maladies – en exposant ses soldats et ses auxiliaires noirs à des conditions climatiques auxquelles ils ne sont pas habitués. Les troupes de Smuts quittent le climat sec de l'Afrique du Sud pour s'enfoncer dans la zone tropicale et boisée, lutter à la fois contre la brousse et les animaux sauvages, traverser de multiples cours d'eau, s'aliéner les populations locales, etc. Les Sud-Africains tombent souvent dans des embuscades soigneusement préparées et les auxiliaires africains allemands s'empressent de leur capturer des vivres et, surtout, des armes. Économiser les munitions et faire mouche à tout coup à courte distance devient un mot d'ordre que Lettow-Vorbeck envoie à ses unités (clip ci-bas). Au début de 1916, la campagne menée par Smuts ne progresse qu'à pas de tortue et lui a déjà coûté plusieurs centaines d'hommes au combat et plusieurs milliers de malades qu'il doit rapatrier – sans compter une facture prohibitive pour le Trésor public sud-africain. La distance parcourue par Smuts est tellement grande que ses troupes ne peuvent plus être ravitaillées. L'inventaire chevalin déployé crève après un mois dans le climat de la jungle, surtout quand les pluies torrentielles et la boue s'en mêlent. Les officiers sud-africains n'ont pas de cartes pour se guider et les communications téléphoniques sont parcellaires. Smuts est sans cesse condamné à ne pas livrer de grands combats et s'enfonce sans cesse dans cette Afrique qu'il ne connaît pas. Il est contraint de recourir à la force pour "raisonner" les habitants du Mozambique. Qui plus est, comme les chevaux manquent, Smuts est obligé d'utiliser ses auxiliaires noirs comme porteurs pour continuer sa campagne. Les Britanniques ont recruté un million de porteurs noirs pour Smuts: un sur cinq vont mourir de maladie et de faim durant toute la durée de la campagne – un taux de perte qui ressemble à celui du front occidental européen...

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Lettow-Vorbeck: faisons une guerre bon marché – La progression sud-africaine est difficile

Les auxilaires Askaris allemands ne subissent pas de telles pertes et sont mieux nourris, appréciés et préparés à poursuive une guérilla qui informe et ravitaille Lettow-Vorbeck. Cependant, le noeud se resserre autour de la colonie allemande de l'Afrique orientale. Notons que dès 1915, les Français avaient délogé les Allemands de leurs possessions du Cameroun et du Togo tandis que les Britanniques terminaient la formation militaire de leurs auxiliaires nigériens. De Novembre 1915 jusqu'à la fin de la guerre, les soldats nigériens bien encadrés par les officiers britanniques vont progressivement ouvrir un nouveau front en se montrant très coriaces contre Lettow-Vorbeck, si bien que sa situation deviendra intenable. En 1917, l'Afrique du Sud envoie un régiment de Noirs bien nourri et très bien entraîné pour aider Smuts: les Royal African Rifles (ci-contre) familiers avec les techniques de guérilla. Ces effectifs combinés entrent en Afrique orientale et prennent Dar-es-Salaam. Les troupes allemandes capitulent mais Lettow-Vorbeck parvient à s'échapper. Il aura droit à un acceuil triomphant à Berlin en 1919. Sur le plan géopolitique, l'Angleterre et la France contrôlent désormais le continent africain et utiliseront des milliers de soldats noirs sur le front européen. Le général français Mangin est convaincu qu'il peut en amener 300,000 pour épauler l'armée française – il en recevra le double: les troupes noires ont toutes les qualités requises pour les combats modernes. Ils sont résistants, tenaces, peu nerveux et ont l'esprit combattif que nous recherchons, écrit-il. L'expérience des combats menés (ou subis) en Afrique et en Europe laisseront un goût amer chez de nombreux vétérans de retour chez eux. Alors que les auxiliaires indiens sont devenus très confiants en eux-mêmes à la fois dans leurs propres capacités militaires et dans l'avenir de l'Inde, les vétérans africains qui retournent chez eux sont plutôt amers et désabusés: nous nous sommes surtout battus comme des esclaves pour défendre des intérêts qui n'est pas vraiment les nôtres. Nous défendons leurs posessions alors que nous n'en avons aucune à protéger. Les officiers européens se comportent envers nous bêtement et sans se soucier si nous reviendrons un jour chez nous. Et pour cause: plusieurs régions de l'Afrique orientale et méridionales ont été ravagées par la guerre et les épidémies depuis 1915. La famine a été le seul legs des belligérants en Afrique: notre seul apport aura été la mort, la désorganisation et la maladie, écrit un médecin allemand. L'indifférence européenne vis-à-vis les déboires africains marquera plusieurs jeunes vétérans comme Léopold Senghor du Sénégal ou Jomo Kenyata de l'Éthiopie.

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Des Spahis marocains – Tirailleurs sénégalais à Fréjus

Sur le plan stratégique, le statisme l'emporte sur l'effort global dès la fin de 1915. Le cours de la guerre ne dépendra plus d'actions sporadiques et limitées autour du monde mais sur des combats décisifs menés en Europe. Durant cette période, l'Allemagne a quand même menée un effort extraordinaire pour étendre le conflit à l'échelle planétaire malgré la pauvreté de ses moyens. Elle a perdu ses croiseurs et toutes ses colonies mais a obligé l'Entente à réfréner son activité militaire en Europe et au Moyen-Orient en recherchant de nouveaux partenaires. Ceux-ci vont montrer leurs muscles en affirmant leurs propres intérêts: ce sera le cas du Japon et, ultérieurement, des États-Unis. Les idées que Guillaume II avaient en horreur (capitalisme américain, égoisme et arrogance des voisins) s'en verront renforcées. Dès lors, l'impérialisme vivra un âge d'or...

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